Le règlement collectif de dettes, une procédure judiciaire particulière
Contexte
Dans les années 80 principalement, on constate que de plus en plus de consommateurs sont en difficulté pour faire face à leurs engagements financiers. Les autorités publiques sont interpellées face à ce problème qui a des conséquences sur le plan économique par le dysfonctionnement du marché et les risques de faillite en cascade et sur le plan social par la paupérisation croissante de la population et l’exclusion sociale
Il devenait urgent de légiférer pour mieux organiser l'offre aux particuliers, la cadrer afin d’éviter les dérives liées aux abus et à l’endettement.
Depuis le 1er septembre 2008, les dossiers de règlement collectif de dettes (RCD) ont été transférés auprès des juges du travail dans la perspective d’une meilleure garantie de la dignité humaine. Le Tribunal du travail aidé par l’auditorat, disposant d’une expérience et de moyens d’investigations qui lui permettent de cerner encore mieux les réalités sociales rencontrées par les personnes confrontées à des problèmes de surendettement.
Règlement collectif de dettes
Le règlement collectif de dettes prend place dans une évolution plus générale du droit à l’exécution dans le courant de l’évolution législative en matière de droit des saisies qui tend à préserver l’efficacité des mesures d’exécution tout en humanisant les procédures.
La loi du 5 juillet 1998 constitue une rencontre entre la vision des débiteurs d'un côté et des créanciers de l'autre, la notion de concours étant primordiale.
La loi est générée par la situation sociale des personnes surendettées mais veille à respecter l'intérêt des créanciers. La médiation de dettes, qu'elle soit judiciaire ou non, allie ces intérêts. Le créancier va obtenir par le médiateur les informations lui permettant de se déterminer quant à l'avenir de sa créance.
La loi au-delà de ces intérêts individuels que sont ceux des débiteurs et des créanciers va poursuivre un objectif d’intérêt général en termes de lutte contre la pauvreté, contre l'exclusion en promouvant la dignité humaine mais aussi conduire à la diminution des coûts externes (comme la sécurité sociale) générés par le surendettement.
L’intérêt général est porté par l’objectif de la procédure qui est de refaçonner l’avenir.
Tout tourne autour de la question de la médiation. Le bénéfice pour les parties sera concrétisé dans l'accord conclu ou la décision du juge.
Procédure particulière
Il s’agit bien d’une procédure, parce qu’elle s’inscrit dans le Code judiciaire et que les acteurs principaux sont un tribunal et un médiateur le plus souvent avocat. Les règles inhérentes à toute procédure judiciaire trouveront en principe à s’appliquer (délais, voies de recours).
Cette procédure qui permet aux particuliers (non-commerçants) d’assainir leur situation financière est cependant une procédure particulière dont les contours sont contenus dans son intitulé :
- Règlement car il s’agit de rétablir la situation financière de la personne surendettée ;
- Collectif car il s’agit de trouver une solution globale au surendettement en tenant compte des intérêts de toutes les parties en présence ;
- Dettes, notion complexe faisant référence à l’argent.
Au centre, le médiateur de dettes qui se voit conférer un mandat de justice par le Tribunal du travail garant de la bonne exécution de la loi. Le statut de ce mandataire est hybride. Il n’est pas le conseil des parties, il n’est pas un gestionnaire financier, il n’est pas représentant légal. Son rôle est cependant essentiel.
Si la procédure de règlement collectif de dettes s’inscrit bien dans le cadre judiciaire, il n’en reste pas moins qu’il ne s’agit pas en l’espèce comme pour toute procédure juridique de trancher un litige en faisant application d’une règle de droit.
Il ne s’agit pas pour le médiateur de dettes de se contenter d’un bilan comptable même si établir un plan est une étape essentielle et une priorité. Ce plan étant dégagé par la distribution d’un disponible (venant de la balance entre les revenus et charges) à répartir entre les créanciers.
Derrière le droit, l’aspect comptable, il y a l’aspect psychologique, philosophique, sociologique, social dont le médiateur ne peut faire fi.
S’il n’est pas le conseil du débiteur ou son représentant, il aura un rôle d’interlocuteur privilégié à son égard. Car si le débiteur doit collaborer tout le long de la procédure, il devra avant toute chose comprendre la procédure qu’il a sollicitée et à laquelle il s’est engagée.
Le médiateur de dettes, outre son rôle de médiateur par la mise en balance des intérêts en présence sera également tenu d’un devoir de communication (à l’égard du débiteur, du tribunal et des créanciers).
Un ouvrage de référence
Dans le cadre de la collection des « Etudes pratiques de droit social », sous la plume de Maître Isabelle Mestdagh, un ouvrage de référence sur le sujet vient d’être publié.
Le présent ouvrage a pour objet d’éclairer sur l’idéologie de loi et ses principes, ainsi que sur les règles de procédure applicables et les mécanismes mis en place par la loi du 5 juillet 1998 pour remédier au surendettement. Il traite également des nombreuses controverses qui jalonnent cette procédure et des disparités qui peuvent exister quant à l’interprétation de certains principes et règles.
Cet ouvrage expose :
- les prémices de la loi et ses idéologies et principe (partie I) ;les règles applicables à l’introduction de la procédure (partie II) ;
- l’étude des parties intervenantes avec leurs droits et leurs obligations (partie III) ;
- la procédure proprement dite, avec sa phase préparatoire, la phase amiable ou judiciaire (partie IV) ;
- les règles de procédure applicables en général (mise en état, audience recours) mais également des procédures spécifiques (la réalisation des biens, l’injonction de communication, les fixations pour fait nouveau et difficulté, le retour à meilleure fortune et les difficultés particulières) (partie V) ;
- les questions particulières qui ponctuent très souvent la procédure de règlement collectif de dettes (question patrimoniale, problème de succession, nouvelles créances, les sûretés, la gestion du patrimoine) (partie VI) ;
- les règles applicables à une étape essentielle qu’est la clôture de la procédure (partie VII).
Cet ouvrage est également disponible sur Jura