le régime de franchise de la taxe pour les petites entreprises
Fiscalité et comptabilité 22 novembre, 2021

 TVA pour les petits entrepreneurs

La TVA est connue pour être une taxe “complexe”. Les petits entrepreneurs en particulier peinent parfois à interpréter et à appliquer correctement les règles complexes en matière de TVA dans leur comptabilité et leurs déclarations fiscales. C’est la raison pour laquelle, dès l’entrée en vigueur du régime TVA il y a 50 ans de cela, deux régimes particuliers ont été introduits :  le régime forfaitaire pour les petites entreprises de certains secteurs avec un chiffre d’affaires annuel inférieur à 750 000 EUR et le régime de franchise de la taxe pour les petites entreprises avec un chiffre d’affaires annuel inférieur à 25 000 EUR.
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Nouvelles règles en matière de TVA s'appliqueront aux petits entrepreneurs dans toute l'Europe

À partir du 1er janvier 2025, de nouvelles règles en matière de TVA s'appliqueront aux petits entrepreneurs dans toute l'Europe. Les États membres seront notamment tenus d'appliquer leur régime national de franchise également aux « entrepreneurs établis dans d'autres États membres de l'Union européenne ». Ce n'est pas le cas actuellement. Des conditions strictes seront évidemment d’application et la mise en œuvre des nouvelles règles fera l’objet d’un contrôle rigoureux. La Commission européenne fixe aujourd’hui les modalités de ce contrôle et décide de quelle manière, d’une part, les États membres échangeront les informations entre eux et, d’autre part, les autorités compétentes accéderont de façon automatisée aux données collectées dans le cadre de cette nouvelle réglementation.

À partir de 2025, les États membres de l'Union européenne seront donc tenus d'appliquer leur régime national de franchise également aux « entrepreneurs établis dans d'autres États membres de l'Union européenne ». Mais les entrepreneurs concernés ne pourront bénéficier de la franchise que si leur chiffre d'affaires dans l'Union européenne ne dépasse pas 100.000 euros. Il appartient au pays d'établissement d'en assurer le contrôle. Les entrepreneurs qui bénéficient de la franchise dans un autre pays de l'Union européenne devront déclarer trimestriellement à leur pays d'établissement la valeur totale des livraisons effectuées et des services fournis dans leur propre État membre et dans les autres États membres. Ils seront en outre tenus d’informer leur propre État membre en cas de dépassement du seuil de 100.000 euros, et ce dans les quinze jours. La Commission européenne définit aujourd’hui un certain nombre de fonctionnalités minimales pour l'interface électronique que les assujettis utilisent dans les États membres d'établissement pour faire leurs notifications et déclarations. L’interface doit par exemple offrir la possibilité de stocker des informations (et leurs modifications).

L'État membre d'établissement est tenu d'informer les autorités compétentes des autres États membres de l'Union européenne au sujet des données collectées dans le cadre du régime de franchise. Il le fait soit via le fameux « réseau commun de communication/l’interface commune des systèmes (réseau CCN/CSI) », soit via un réseau ou un système sécurisé équivalent permettant un accès automatisé. Grâce à ce système, l'autorité compétente doit, entre autres, pouvoir accéder au numéro d'identification individuel de l'assujetti, à ses données d'identification (nom, activité, secteur d'activité, forme juridique, adresse), aux États membres dans lesquels il bénéficie de la franchise, au montant total des livraisons de biens et/ou des prestations de services et à la date à laquelle le chiffre d'affaires annuel dans l’Union européenne a été dépassé. L'État membre d'établissement utilise également le système pour informer les autorités compétentes des États membres de franchise des notifications préalables des assujettis concernant leur intention de bénéficier de la franchise, ou pour les informer du non-respect par des assujettis de leur obligation de déclaration. L'État membre de franchise utilise également le système pour transmettre les informations nécessaires à l'État membre d'établissement, par exemple pour communiquer la date à laquelle le régime particulier pour les petites entreprises cesse de s'appliquer.

Enfin, les États membres doivent également échanger entre eux des informations générales sur l'application des nouvelles règles. Ils le font via le portail internet mis en place à cette fin par la Commission européenne.

En quoi consiste précisément le régime de franchise de la taxe pour les petites entreprises ?

Le régime de franchise de la taxe dispense les petites entreprises avec un chiffre d’affaires annuel ne dépassant pas 25 000 EUR d'un certain nombre d’obligations en matière de TVA. Ces entreprises ne doivent pas :

  • porter de TVA en compte à leurs clients ;
  • verser de TVA au Trésor ;
  • introduire des déclarations périodiques à la TVA.

En contrepartie, ces entreprises ne peuvent pas déduire la TVA payée en amont à leurs fournisseurs. Elles ne peuvent évidemment pas mentionner de TVA sur les factures ou les documents qui en tiennent lieu qu’elles délivrent pour les biens ou services qu’elles fournissent ; elles doivent, par contre, y apposer la mention « Régime particulier de franchise de la taxe pour les petites entreprises ».

La forme juridique adoptée par ces petites entreprises importe peu. Le régime de franchise de la taxe s’applique aux personnes physiques, aux sociétés de personnes, aux sociétés de capitaux, aux associations, aux organismes publics…

Il est bon de savoir que ce régime de franchise de la taxe est un régime optionnel : l’assujetti qui répond aux conditions peut choisir de quand même se soumettre au régime normal, ou éventuellement de suivre le régime forfaitaire, tel que prévu à l’ art. 56 §1er C.TVA, si celui-ci est d’application.

Inversement, l’administration de la TVA peut également décider de soumettre l’assujetti à un autre régime TVA, comme le régime normal ou le régime forfaitaire, lorsque les circonstances montrent clairement que les conditions posées en vue de l’application du régime de franchise de la taxe ne sont pas réunies. Dans ce cas, la demande (formulaire n° 604.A accompagnée de la déclaration de début d’activité) est rejetée par une décision motivée.

Comment le chiffre d’affaires est-il calculé exactement ?

Quelles sont les opérations respectivement prises en compte et exclues lors du calcul du chiffre d’affaires annuel ?

  • OPÉRATIONS PRISES EN COMPTE
    • Les opérations qui seraient soumises à la taxe si elles étaient réalisées par un assujetti soumis au régime normal ou au régime forfaitaire
    • Les opérations exonérées, comme les exportations, les livraisons intracommunautaires, les prestations de services à des représentations diplomatiques et consulaires et à des organisations internationales, les livraisons de et à des navires, bateaux, avions...
    • Les opérations portant sur des biens immobiliers, sauf si ces opérations sont accessoires
    • Les opérations financières, sauf si ces opérations sont accessoires
    • Les opérations d’assurance et de réassurance, sauf si ces opérations sont accessoires
  • OPÉRATIONS EXCLUES
    • La cession de biens d'investissement corporels ou incorporels
    • Les opérations exclues du régime de franchise de la taxe
    • Les opérations réalisées par des exploitants agricoles soumis au régime particulier, tel que visé à l’art. 57 C.TVA
    • D’autres opérations exonérées par le Code de la TVA, comme les opérations réalisées par des médecins, des maisons de repos, des écoles ; les contrats d’édition d'œuvres littéraires ou artistiques conclus par des auteurs ou compositeurs ; les livraisons de timbres postes à leur valeur faciale ; les paris, loteries et autres jeux de hasard et d’argent ; les prestations de services et les livraisons de biens accessoires à ces prestations de services effectuées par les prestataires de services postaux qui s'engagent à assurer la totalité ou une partie du service postal universel lorsque ces prestations de services concernent des services postaux universels tels que définis à l'article 142 de la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques
    • Les opérations localisées à l’étranger

Qu’en est-il si l’entrepreneur démarre son activité en cours d’année ?

Si l’assujetti commence son activité économique en cours d'année, le seuil de 25 000 EUR est réduit au prorata du nombre de jours calendrier écoulés entre le 1er janvier de l’année civile considérée et la date de commencement de l’activité (art. 56bis, § 1er, alinéa 2 C.TVA). Cette réduction au prorata temporis du chiffre d’affaires n’est toutefois pas requise pour les entreprises saisonnières ou les entreprises dont l’activité est exercée de manière intermittente (Circulaire dd. 25.08.2014, n° 18).

Exemple 1
Un assujetti à la TVA souhaite démarrer son activité le 16 avril 2021. Il veut savoir s'il entre en considération pour l’application du régime de franchise de la taxe pour les petites entreprises. Il estime son chiffre d’affaires pour cette année à 17 000 EUR. Le seuil de 25 000 EUR doit être proratisé comme suit : 
25 000 EUR - (25 000 EUR x 105/365) = 17 808,22 EUR
L’assujetti entre donc en considération pour le régime de franchise de la taxe pour les petites entreprises.

Exemple 2
Un assujetti à la TVA pour son activité accessoire de vendeur de glaces et boissons fraîches vend des glaces et boissons fraîches sur le littoral pendant les deux mois de vacances. Il est assujetti à la TVA soumis au régime de franchise de la taxe à partir du 1er mai 2021. Le chiffre d’affaires réalisé durant les mois de juillet et août 2021 s’élève à 3 200 EUR. Ce montant constitue le chiffre d’affaires qui servira de référence. Vu qu'il s'agit d'une activité saisonnière, il n’y a pas lieu de le réduire au prorata temporis.

Comment s’effectue le contrôle du chiffre d’affaires ?

L’assujetti à la TVA qui applique le régime de franchise de la taxe au 31 décembre informe l’administration de la TVA avant le 31 mars de l’année suivante du montant total du chiffre d’affaires réalisé au cours de l’année civile écoulée. Dans le cas où l’activité économique commence en cours d’année, l’assujetti doit en outre indiquer durant quelle période il a exercé cette activité. Ces données sont reprises dans le cadre prévu à cet effet de la liste annuelle des clients assujettis que l’assujetti à la TVA doit introduire auprès de l’administration de la TVA conformément à l’art. 53quinquies C.TVA.
 

Quels sont les assujettis exclus du régime de franchise de la taxe ?

En raison de leur qualité ou activité, les entreprises suivantes ne peuvent faire application du régime de franchise de la taxe : 

  • les unités TVA ;
  • les entreprises qui réalisent des opérations consistant en un travail immobilier et des opérations assimilées ;
  • les exploitants d'un établissement où sont régulièrement consommés des repas, ainsi que les traiteurs qui effectuent régulièrement des prestations de restauration et qui sont tenus de délivrer au client un ticket de caisse provenant d'un système de caisse enregistreuse ;
  • les entreprises qui effectuent des livraisons de matériaux usagés, de matériaux usagés ne pouvant pas être réutilisés en l’état, de déchets industriels et non industriels, de déchets de récupération, de déchets en partie transformés et de débris.

Ces assujettis à la TVA sont exclus du régime de franchise de la taxe pour l’ensemble de leur activité, même s'ils réalisaient également d’autres opérations qui pourraient en principe être soumises au régime et que leur chiffre d’affaires était inférieur au seuil de 25 000 EUR.

Quelles sont les opérations exclues du régime de franchise de la taxe ?

Un assujetti à la TVA qui veut bénéficier du régime de franchise de la taxe pour les petites entreprises peut en principe réaliser toutes les opérations visées dans le Code de la TVA. Un certain nombre d’opérations sont toutefois explicitement exclues de ce régime (art. 56bis, § 3 C.TVA) : 

  • Les cessions à titre onéreux par des assujettis occasionnels de bâtiments neufs construits ou acquis avec application de la TVA ;
  • Les constitutions, cessions ou rétrocessions par des assujettis occasionnels de droits réels, autres que la propriété, sur des biens immeubles ;
  • Les livraisons occasionnelles et à titre onéreux, vers un autre État membre de l’UE, de moyens de transport neufs ;
  • Les livraisons, par un pêcheur, du produit de son activité dans les minques communales des ports de débarquement ;
  • Les livraisons de tabacs manufacturés, tels que cigarettes, tabac à rouler ;
  • Les opérations pour lesquelles la TVA est exigible en Belgique et qui sont réalisées par des assujettis qui n'y sont pas établis ;
  • Les opérations effectuées de manière occulte : opérations non déclarées ou illicites.

Lorsque la petite entreprise réalise une ou plusieurs de ces opérations, elle ne peut pas bénéficier du régime de franchise de la taxe pour ces opérations, mais elle peut bénéficier du régime de la franchise pour toutes ses autres opérations, dans la mesure où elle répond aux conditions d’application de ce régime et où le chiffre d’affaires se rapportant à ces « autres opérations » ne dépasse pas la limite de 25 000 EUR.

Quelles sont les obligations imposées par le régime de franchise de la taxe ?

  • La petite entreprise a moins d'obligations qu’un assujetti « normal ». Elle ne doit entre autres pas introduire de déclarations périodiques à la TVA. Elle conserve toutefois les obligations suivantes : 
  • Remettre les déclarations de commencement, de changement et de cessation d’activité ;
  • Apposer la mention « Régime particulier de franchise des petites entreprises » sur les factures ou documents en tenant lieu – ne surtout pas imputer de TVA aux clients ;
  • Conserver les factures reçues par ordre chronologique – parce qu’elle est dispensée de tenir un facturier d’entrée ;
  • Conserver et numéroter les factures qu'elle a délivrées – parce qu’elle est également dispensée de tenir un facturier de sortie ;
  • Tenir un journal de recettes ;
  • Tenir un tableau des biens d'investissement, si de tels biens sont acquis par l’entreprise ;
  • Avant le 31 mars de chaque année, déposer une liste des clients assujettis auxquels elle a livré des biens ou fourni des services au cours de l’année écoulée. Cette liste doit également renseigner le montant total du chiffre d’affaires réalisé au cours de l’année écoulée lorsque, au 31 décembre de cette année, l’assujetti appliquait le régime de franchise de la taxe . Si l’activité a débuté en cours d’année, la période durant laquelle l’activité a été exercée doit aussi être indiquée. La petite entreprise peut déposer cette liste de manière électronique, mais elle n'y est pas obligée ;
  • Communiquer son numéro d’identification BE à ses fournisseurs et clients (et donc le mentionner sur tous les contrats, factures, bons de commande...) ;
  • La petite entreprise qui a effectué des acquisitions intracommunautaires de biens ne peut communiquer son numéro d’identification à ses fournisseurs que si elle a préalablement fait une déclaration de dépassement du seuil, ou si elle a exercé l’option de soumettre à la TVA belge ses acquisitions intracommunautaires de biens (dès qu’elle communique son numéro d’identification précédé des lettres BE à son fournisseur, elle est présumée avoir exercé cette option). Elle doit communiquer ce numéro dans tous les autres cas ;
  • Lorsqu'un assujetti non établi en Belgique lui fournit un service intracommunautaire, la petite entreprise doit communiquer son numéro d’identification précédé des lettres BE à son prestataire de services. La petite entreprise doit reprendre la TVA belge due sur ce service dans la déclaration spéciale à la TVA de la période correspondante et verser cette TVA au Trésor belge ;
  • Remettre, le cas échéant, un relevé de ses opérations intracommunautaires (prestations de services visées par la règle générale de localisation du service au lieu du preneur) ; elle peut déposer ce relevé de manière électronique, mais elle n’y est pas obligée ;
  • Déposer une déclaration spéciale à la TVA au plus tard pour le 20 du mois qui suit le trimestre civil au cours duquel elle a reçu un bien ou un service pour lequel elle est redevable de la TVA.

Auteur : Sven Reynders
Source : monKEY - La banque de données spécialisée pour les professionnels de la fiscalité, de la finance et de la comptabilité

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