Par Me Frédéric Poirier et Me Stéphanie Lalande du cabinet Bélanger Sauvé.
Résumé : Le Tribunal administratif du travail a récemment rejeté une plainte suivant l’article 15 du Code du travail déposée par un lieutenant pompier congédié pour des motifs disciplinaires en même temps qu’il participait à une campagne de syndicalisation. Le tribunal souligne au passage l’importance du respect de la ligne de commandement par les pompiers d’un service d’incendie municipal.
Faits
Le plaignant occupait le poste de lieutenant au service des incendies de la Ville de Richelieu. Il a été congédié pour des motifs disciplinaires de façon concomitante à sa participation à une campagne de syndicalisation. En conséquence, celui-ci a déposé une plainte en vertu de l’article 15 du Code du travail. Ainsi, le tribunal(1) mentionne d’emblée que la question à laquelle il faut répondre est la suivante :
Est-ce que la Ville a réussi à repousser la présomption en démontrant l’existence d’une autre cause juste et suffisante de congédiement?
La Ville reproche ce qui suit au plaignant :
Suite aux événements survenus les 7 et 14 juin, une enquête débute. Le 4 août, le plaignant est suspendu cinq jours pour ces événements.
Au cours de l’été 2016, l’Association des pompiers crée une page Facebook afin que les membres de la brigade puissent converser confidentiellement sur des sujets qui les concernent.
Un des lieutenants accède à cette page et n’aime pas ce qu’il lit. Il considère que les échanges vont dans la mauvaise direction et que les propos de certains de ses collègues dépassent les limites acceptables, notamment parce qu’ils critiquent sans ménagement et en termes très peu élogieux le travail des membres de l’état-major.
Le lieutenant décide de rapporter à ses supérieurs la teneur de ces échanges. Le 29 août, il rencontre ses supérieurs à cet égard.
Le 31 août, il rencontre le plaignant et lui relate ce qu’il a lu sur Facebook. Ce dernier lui demande de fournir des preuves.
Suivant tous les événements, le 6 septembre, le conseil municipal décide de congédier le plaignant parce qu’il n’est pas digne de confiance, qu’il a une attitude négative et qu’il n’a aucun respect pour la Ville et l’état-major. Il estime que sa présence a un effet toxique sur le service des incendies.
Décision
Tout d’abord, le juge administratif signale que le litige se déroule dans un service municipal de lutte contre les incendies où doit régner une discipline quasi militaire. Il en va de l’efficacité des interventions et de la sécurité des pompiers et du public. Il faut donc obéir aux ordres, respecter la hiérarchie et suivre la ligne de commandement. De plus, à titre de lieutenant, le plaignant doit faire respecter l’autorité de ses supérieurs.
En ce qui concerne les suspensions relatives aux événements des 7 et 14 juin, le juge administratif confirme que le comportement du plaignant méritait une suspension. En effet, le plaignant a agi de façon hostile et agressive envers ses supérieurs, en plus d’avoir insulté le directeur des incendies en son absence.
Le juge examine ensuite des captures d’écran de Facebook, dont il fait état comme suit :
Le juge en conclut qu’en boycottant une rencontre obligatoire, le plaignant contrevient à ses obligations déontologiques et professionnelles. Il s’agit d’une faute grave, d’autant plus qu’il occupe un poste de lieutenant et qu’il a été avisé 12 jours auparavant, lors de la remise de sa lettre de suspension, que toute faute pourrait mener au congédiement.
Suivant tous les événements initiaux, la suspension et les interventions sur la page Facebook, le juge administratif confirme le congédiement. Plus précisément, il souligne ce qui suit :