Fiscalité et comptabilitéjanvier 21, 2021

Décisions récentes en taxes à la consommation

Responsabilité des administrateurs — Taxe non remise — Transfert entre personnes liées — Cotisation pouvant être émise «en tout temps»

Sheck c. La Reine, 2018 CCI 125 En 2008, le conjoint de la contribuable lui transfère une somme de 17 500 $ sans considération particulière. Au moment du transfert, une société dont le conjoint de la contribuable est l'unique administrateur doit des sommes au ministre du Revenu national («Ministre») à titre de taxe perçue et non remise. En 2016, le Ministre émet des avis de cotisation au conjoint à titre d'administrateur et à la contribuable en raison du transfert datant de 2008. La contribuable porte cette décision en appel. L'appel est rejeté La contribuable argumente que son conjoint n'est pas responsable du paiement de la taxe au moment du transfert, car il n'a pas été cotisé personnellement. La Cour rejette cet argument, en se fondant sur le texte même de la LTA, qui crée une responsabilité solidaire au moment où la taxe devient payable, et non pas au moment de la cotisation. La longue période de temps écoulée n'est pas non plus pertinente, car la loi prévoit que le Ministre peut émettre une cotisation «en tout temps».   

Demande péremptoire — Autorisation judiciaire — Documents visés par la demande concernent des clients d’Hydro-Québec — Atteinte à la vie privée

MRN c. Hydro-Québec, 2018 CF 62 Le ministre du Revenu national («Ministre») demande l'autorisation judiciaire afin de présenter une demande péremptoire à Hydro-Québec. Hydro-Québec indique à la Cour qu'elle est prête à obtempérer à la demande. Cependant, les informations demandées ne visent pas Hydro-Québec, mais bien ses clients. La Cour doit donc s'assurer que les droits de ces derniers sont protégés. La requête est rejetée. La demande péremptoire ratisse très large et vise la très grande majorité des clients commerciaux d'Hydro-Québec. L'usage que compte faire le Ministre des informations obtenues n'est par ailleurs pas très clair. Ainsi, les circonstances de cette affaire requièrent que la surveillance judiciaire nécessaire pour éviter les atteintes indues à la vie privée d’un grand nombre de personnes soit exercée.   

Vente d’un terrain incluant une piscine et un corridor conduisant à un lot adjacent — Terrain vacant vs unité d’habitation usagée — Vente taxable vs exonérée — Remboursement de frais de développement payés par l’acheteuse

2137691 Ontario Limited c. Park, 2018 ONSC 4218 La société 2137691 Ontario vend à madame Park («Park») un terrain sur lequel se trouve une piscine intérieure et un corridor menant de la piscine à une maison située sur un lot adjacent. Les parties demandent à la Cour de déterminer, par voix de jugement déclaratoire, si l'immeuble est un terrain vacant ou une unité d'habitation usagée. Dans le premier cas, la vente sera taxable et dans le second exonérée. Advenant une vente taxable, les parties demandent à la Cour de déterminer qui doit payer la taxe. Parallèlement, Park demande, également par jugement sommaire déclaratoire, que les frais de développement chargés par la ville où est situé l'immeuble lui soient remboursés par la société, conformément à leur contrat original. La Cour émet un jugement déclaratoire. La Cour détermine que la piscine intérieure et le corridor constituent, au moment de la vente, une «partie» d'un immeuble d'habitation usagé et que la vente est donc une fourniture exonérée. Le tribunal ajoute qu'advenant qu'il ait tort sur ce point, ce serait à 2137691 Ontario de payer la taxe. Par ailleurs, la société doit clairement, aux termes mêmes du contrat, rembourser les frais de développement payés par Park.   

Médicaments — Soins dentaires — Fourniture de solutions anesthésiques contenant de l’épinéphrine — Ingrédient secondaire

Patterson Dental Canada Inc. c. La Reine,2018 CCI 112 La contribuable exploite une entreprise de vente de produits médicaux, incluant la vente de solutions anesthésiques à des dentistes. Les solutions anesthésiques contiennent de l’épinéphrine. La fourniture d'épinéphrine est détaxée aux fins de la LTA. Le ministre du Revenu national («Ministre») soutient que l'épinéphrine est un élément secondaire des produits vendus par la contribuable. Le Ministre émet un avis de cotisation soutenant que les fournitures sont taxables. La contribuable porte cette décision en appel. L’appel est rejeté. L'ajout d'épinéphrine aux solutions anesthésiques de la contribuable sert à contrer les effets secondaires ou à améliorer la coagulation. Ce n'est pas l'élément principal du médicament. De considérer que dès qu'un produit contient de l'épinéphrine, sa vente devient détaxée irait à l'encontre de l'intention du législateur.   

Remboursement pour habitation neuve — Critère du principal lieu de résidence — Aucun changement d’adresse effectué par le contribuable

Collin c. La Reine,2018 CCI 145 L'appelant et sa conjointe habite à Val-Morin. À la suite de la fermeture de l'aéroport de Mirabel, la conjointe du contribuable a été mutée à l'aéroport de Dorval pour son travail. Après un certain temps, ils acquièrent un condo à Montréal pour réduire les déplacements de madame. Essentiellement, elle vit à Montréal la semaine et à Val-Morin la fin de semaine. Le ministre du Revenu national («Ministre») considère qu'il ne s'agit pas de la résidence principale du contribuable ou de sa conjointe. Le Ministre refuse le remboursement de taxe pour l'achat d'un immeuble neuf. Le contribuable porte cette décision en appel. L’appel est rejeté. La Cour prend en considération l'ensemble des éléments de preuve et notamment le fait que ni le contribuable ni sa conjointe n'ont effectué de changements d'adresse. Essentiellement, le condo est un pied-à-terre à Montréal et ne se qualifie pas pour le remboursement.   

Demande de CTI — Renseignements nécessaires — Numéro de TPS du fournisseur annulé — Compensation suite à un litige commercial réputée fourniture taxable

THD Inc. c. La Reine,2018 CCI 147 La contribuable exploite une entreprise de transport. Dans le cadre de ses activités commerciales, elle réclame des CTI pour des achats fait auprès d'un fournisseur. Les factures transmises par ce dernier comportaient un numéro d'inscription à la TPS qui a été annulé par la ministre du Revenu national («Ministre»). Par ailleurs, à la suite d'un litige contractuel avec une cliente, la contribuable s'est vu accorder un montant de dommages en arbitrage suite à une modification unilatérale d'un contrat par une cliente. Le Ministre considère que: (1) la contribuable n'a pas droit au CTI; et (2) le TPS aurait dû être perçue sur la somme reçue en arbitrage. La contribuable porte cette décision en appel. L’appel est rejeté. Pour donner droit à un CTI, la facture d'un fournisseur doit obligatoirement inclure un numéro de TPS/TVH valable. Quant aux dommages, il s'agit clairement d'une compensation suite à une modification d'un contrat commercial et, donc, d'une fourniture réputée taxable.   

Transfert d'un immeuble entre personnes liées — Compensation — Débiteur fiscal — Relation cédant-cessionnaire — Responsabilité solidaire

Shieh c. La Reine,2018 CCI 154 Le fils de la contribuable lui transfère la propriété d'un immeuble alors qu'il est un «débiteur fiscal» au sens de la LTA et de la LIR. Selon le ministre du Revenu national, ce transfert est effectué sans contrepartie valable et entraîne donc la responsabilité solidaire de la contribuable pour la dette fiscale de son fils. La contribuable porte cette décision en appel. L’appel est rejeté. Il est admis qu'il y a eu un transfert de biens entre personnes liées, soit le fils et la mère. Le fils de la contribuable a expliqué que la contrepartie était l'annulation d'une dette d'environ 200 000 $ cumulée au fil des ans, car ses parents avaient payé son éducation, sa première voiture, ses taxes municipales et plusieurs autres aspects de sa vie. Bien qu'aucun document de prêt officiel n'existe, il se sentait moralement obligé de rembourser. La Cour, tout en admirant le sentiment, rejette cet argument du point de vue légal. Par contre, la Cour émet des doutes quant à la somme réellement due par le fils de la contribuable, et donc par la contribuable. Le juge donne des instructions quant à son calcul.   

Exploitation d’immeubles par un groupe — Frais de gestion — Sommes reçues résultant d’une participation à une coentreprise — Choix concernant les coentreprises

Medallion Corporation c. La Reine,2018 CCI 157 La contribuable est impliquée dans l'exploitation d'immeubles conjointement avec de nombreux partenaires. Le ministre du Revenu national («Ministre») considère que les sommes reçues du groupe par la contribuable sont des honoraires de gestion et représentent donc des sommes taxables. La contribuable soutient plutôt être membre d'une coentreprise et que les sommes qu'elle reçoit sont le résultat de sa participation à cette dernière et sont, par conséquent, non taxables. Elle porte la décision du Ministre en appel. L'appel est accueilli. Le tribunal fait une analyse exhaustive des critères qui définissent une coentreprise. Il détermine en particulier que la contribuable a droit à une participation aux profits en vertu des différentes ententes entre les parties. Il s'agit donc d'une coentreprise et les sommes reçues par la contribuable ne sont donc pas taxables.   

Faillite — Transfert des remboursements de TPS aux créanciers — Ordonnance de paiement — Taxation du mémoire du syndic

Glasgow et. al. (Re), 2018 ONSC 4608 Le syndic agissant pour trois faillites demande la taxation de son mémoire. Celui-ci inclut le transfert des remboursements de TPS des faillis au syndic, au bénéfice des créanciers. Le Surintendant des faillites se questionne sur la validité de cette pratique et soumet le tout au tribunal. La taxation est refusée. À la suite de la décision McIntyre, une pratique de transfert des remboursements de TPS des faillis directement au syndic semble s'être instaurée. Cette démarche se veut pratique, car elle évite au syndic de faire un chèque au failli qui doit ensuite souvent lui retourner les fonds. Cependant, le tribunal rejette expressément la décision McIntyre en expliquant que la Loi indique clairement qu'une dette du gouvernement, lorsqu'elle est payée, doit être remise au failli. La volonté d'utiliser une approche pratique ne saurait permettre de contourner des dispositions claires de la Loi.

Wolters Kluwer Canada
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