Fiscalité et comptabilitédécembre 03, 2020

Décisions récentes en taxes à la consommation

Dette fiscale — Transfert de la résidence familiale en faveur de l’épouse du débiteur fiscal — Calcul de la valeur du bien transféré

Casolino c. La Reine, 2020 CCI 99

L’unique administrateur et actionnaire, monsieur Casolino, de la société 706177 Ontario inc. (Société), exploitait une entreprise de peinture commerciale. La Banque de Montréal (Banque) a accordé une marge de crédit à la Société et a enregistré une hypothèque sur la résidence familiale de monsieur Casolino et de son épouse. L’obligation de payer cette marge de crédit incombait en premier lieu à la Société, puis à monsieur Casolino si la Société n’était pas en mesure de payer. En février 2003, monsieur Casolino a transféré à son épouse (appelante) sa part dans la résidence familiale. La résidence a été réhypothéquée et l’appelante a accepté de prendre en charge la totalité de la marge de crédit de la Société. Au moment de ce transfert, monsieur Casolino avait une dette fiscale de plus de 69 000 $. Par conséquent, le ministre du Revenu national (ministre) a émis un avis de cotisation à l’encontre de l’appelante en vertu du paragraphe 325(1) LTA. 

L’appel est accueilli en partie.

Le ministre estime que l’appelante n’a fourni aucune contrepartie pour acquérir la part de monsieur Casolino dans la résidence familiale. Dans son calcul, le ministre attribue à l’appelante la moitié de la dette appartenant à la Société, avant le transfert. Le résultat est que monsieur Casolino aurait transféré une valeur d’environ 98 000 $ à l’appelante, ce qui représente un montant supérieur à celui de sa dette fiscale. La Cour est en désaccord avec le calcul du ministre. De l’avis de la Cour, il serait inapproprié de réduire la valeur de la propriété de l’appelante, avant le transfert, de la dette due par la Société, et ce malgré le fait que la Banque ait enregistré une hypothèque sur la résidence pour garantir le paiement de cette dette. L’appelante a plutôt fourni, à titre de contrepartie, le montant de la dette de la Société qu’elle a totalement pris en charge dans le cadre du transfert de la propriété. Ainsi, monsieur Casolino a transféré non pas une valeur d’environ 98 000 $ à l’appelante, mais plutôt d’environ 11 000 $, en tenant compte de la contrepartie fournie par l’appelante. Le dossier est renvoyé au ministre pour nouvelle cotisation.

 

Remboursement pour habitations neuves — Définition de «constructeur» — Entente préalable entre un constructeur et un courtier immobilier

Sun c. La Reine, 2020 CCI 112

En 2011, monsieur Zhang, un courtier immobilier, a signé avec un constructeur une convention à l’égard d’un condominium établissant un prix de vente de 326 900 $, TVH nette comprise (déduction faite du remboursement prévue de la TVH) et prévoyant des restrictions sur sa cession, notamment que monsieur Zhang pouvait céder ses droits dans la convention s’il en avisait le constructeur dans un certain délai. En 2014, monsieur Zhang et l’appelant ont signé une convention de cession à l’égard du condominium, conformément au contrat conclu avec le constructeur. Monsieur Zhang n’a fait aucun profit sur la cession de ce condominium. Il n’a toutefois pas avisé le constructeur dans le délai prévu au contrat. Selon le ministre du Revenu national (ministre), le condominium n’aurait pas été acheté du constructeur mais plutôt du courtier immobilier, monsieur Zhang. Par conséquent, le ministre a refusé la demande de remboursement de la TPS/TVQ pour habitations neuves à l’égard du condominium en question.

L’appel est accueilli.

La Cour ne voit pas de problème au fait que les avis au constructeur n’aient pas été donnés à temps. Des courriels soumis en preuve confirment que le constructeur a accepté le transfert du titre de propriété en faveur de l’appelant. Le contrat de cession du condominium fait référence au contrat entre le constructeur et monsieur Zhang. Il n’y a pas eu de vente entre le constructeur et le courtier immobilier et il est clair que l’appelant n’a pas acheté le condominium du courtier immobilier mais bien du constructeur. Le registre foncier fait également foi du transfert du titre de propriété. Le contribuable a donc droit au remboursement pour habitations neuves, toutes les autres conditions étant par ailleurs rencontrées.


Définition de «constructeur» — Construction dans le cadre ou non d’une entreprise ou d’une affaire de caractère commercial — Perception de la taxe lors de la vente — Exception pour utilisation personnelle — Interprétation de l’expression «utilisé principalement» 

Swift c. La Reine, 2020 CCI 115

Le contribuable et son ex-conjointe ont habité ensemble cinq résidences familiales. L’une de ces résidences, celle en litige, a été construite par le contribuable et sa société de construction. Cette résidence a été vendue quelques années plus tard. Le ministre du Revenu national (ministre) estime que le contribuable était un constructeur, au sens du paragraphe 123(1) LTA et qu’il n’était pas admissible à l’exception pour utilisation personnelle prévue au paragraphe 191(5) LTA. Lorsqu’un particulier n’est pas un constructeur et qu’il construit une résidence pour son utilisation personnelle, aucune TPS/TVH n’est exigible. Toutefois, s’il est un constructeur et qu’il construit une résidence en vue de la vente à un acheteur, il est tenu de percevoir la TPS/TVH à l’égard de la contrepartie payée par l’acheteur. Lorsque le constructeur est un particulier et qu’il occupe la résidence avant de la vendre à un acheteur, la règle de la fourniture à soi-même prévue au paragraphe 191(1) LTA peut obliger le constructeur à s’autocotiser et à payer la taxe à l’égard de la juste valeur marchande de la résidence. Une exception à cette règle s’applique, en vertu du paragraphe 191(5) LTA, si le constructeur construit la résidence et l’utilise principalement comme résidence pour lui-même et non principalement à une autre fin.

L’appel est accueilli.

La Cour conclut que le contribuable n’est pas un constructeur au sens du paragraphe 123(1) LTA. La définition de «constructeur» de la LTA prévoit qu’un particulier n’est pas un constructeur s’il construit ou fait construire une résidence en dehors du cadre d’une entreprise, d’un projet à risques ou d’une affaire de caractère commercial. Dans la présente affaire, bien que la société du contribuable l’ait aidé à construire la résidence dans le cadre de sa propre entreprise, le contribuable lui n’a pas construit sa résidence dans le cadre d’une entreprise ou d’une affaire à caractère commercial. La résidence a plutôt été construite dans le but d’y résider. Les critères énumérés dans la décision MNR c. Taylor ((1956-1960) R.C. de L’E. 3) pour être en présence d’une affaire de caractère commercial, à savoir la nature du bien vendu, la période pendant laquelle le contribuable a été propriétaire, la fréquence ou le nombre de transactions similaires effectuées par le contribuable, les travaux effectués, les circonstances entourant la vente du bien et les intentions, ne sont pas rencontrés. Par ailleurs, la Cour estime que même si le contribuable avait été qualifié de constructeur, l’autocotisation du paragraphe 191(1) LTA n’aurait pas été applicable dans son cas, en raison de l’exception du paragraphe 191(5) LTA qui s’applique lorsque le constructeur est un particulier et que l’immeuble est utilisé principalement à titre résidentiel, notamment par le particulier, et que cet immeuble n’est pas utilisé principalement à une autre fin à compter du moment où les travaux sont achevés en grande partie. De l’avis de la Cour, l’expression «est utilisé principalement à titre résidentiel» de ce paragraphe ne fait pas référence à la superficie de la résidence utilisée comme immeuble résidentiel mais fait plutôt référence à l’intention principale du constructeur de l’utiliser à des fins personnelles.

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